Une accélération sans précédent du segment électrique en octobre
Le marché français de l’automobile électrique vient de franchir un seuil symbolique.
En octobre 2025, 34 108 véhicules particuliers électriques ont été immatriculés, soit une hausse de 63 % par rapport à octobre 2024.
La part de marché du véhicule électrique atteint désormais 24 % des immatriculations neuves, contre 15 % un an plus tôt.
Il s’agit de la plus forte progression mensuelle depuis l’introduction du bonus écologique en 2008.
Cette dynamique confirme une mutation structurelle du marché, portée en grande partie par un outil devenu central : le leasing social.
Le leasing social : un outil de démocratisation ciblée
Lancé en 2023 et relancé le 30 septembre 2025, le dispositif de leasing social vise à rendre accessible la voiture électrique à des ménages jusque-là exclus du marché du neuf.
Il repose sur un mécanisme de location longue durée (LLD) financée partiellement par l’État.
Les véhicules éligibles doivent respecter des critères stricts de performance environnementale, de production européenne et de coût maximal.
En contrepartie, les loyers sont plafonnés à 100 €/mois pour une citadine et 150 à 200 €/mois pour une compacte, sans apport.
Les critères d’éligibilité des ménages sont eux aussi précis :
• Revenus : revenu fiscal de référence par part inférieur à 16 400 €
• Usage : déplacement domicile-travail supérieur à 15 km, ou 8 000 km annuels dans le cadre d’une activité professionnelle
• Engagement : contrat de LLD d’une durée minimale de 3 ans
Ce cadre rigoureux permet de cibler une population-clé pour la transition énergétique, tout en sécurisant les acteurs du financement via des aides directes.
Un impact mesurable sur les volumes et les modèles
Le leasing social a déjà un effet significatif sur la structure du marché. Parmi les véhicules les plus immatriculés en octobre figurent :
• Renault Twingo E-Tech : 4 551 unités
• Peugeot e-208 : 2 438 unités
• Dacia Spring : 1 893 unités
• Renault Scénic E-Tech : 1 670 unités
• Tesla Model Y : 1 660 unités
Ces chiffres démontrent une orientation très nette vers des modèles compacts, produits en Europe, dont le TCO (Total Cost of Ownership) est compatible avec les seuils définis par le dispositif.
Une opportunité structurelle pour les acteurs du leasing
Du point de vue des spécialistes du financement locatif, le leasing social représente un accélérateur de volumes, mais aussi une transformation du modèle économique.
Les contrats générés par ce dispositif présentent plusieurs caractéristiques notables :
• Loyers réduits mais garantis, grâce à la subvention étatique
• Risque d’impayés modéré via le ciblage des ménages solvables et la vérification préalable par l’ASP (Agence de services et de paiement)
• Véhicules standards à faible décote, facilement reconditionnables en seconde main
• Forte rotation permettant une mise à jour fréquente du parc et une optimisation des actifs pour les gestionnaires
Pour les entreprises du secteur comme Leaseworld, cela ouvre des perspectives nouvelles sur le marché de la LLD : industrialisation du scoring, automatisation des contrôles d’éligibilité, et création de portails d’accès simplifiés à destination des collectivités et des salariés.
Un modèle extensible au segment professionnel ?
Bien que le leasing social soit à ce jour réservé aux particuliers, son succès interroge sur la possibilité de le transposer au segment professionnel.
De nombreuses PME, artisans, professions libérales ou indépendants ne rentrent pas dans le cadre du leasing social, mais partagent les mêmes contraintes budgétaires et écologiques.
Les acteurs institutionnels comme Bpifrance ou l’ADEME envisagent des dispositifs voisins pour le renouvellement des flottes légères professionnelles.
La logique de LLD subventionnée pourrait ainsi s’étendre, en s’appuyant sur des critères d’activité (métier, kilométrage, territoire) et non plus uniquement sur les revenus fiscaux.
Pour les loueurs professionnels, cela représenterait un levier supplémentaire pour capter un volume additionnel structurant et accélérer la transition vers l’électrique.
Des limites et points de vigilance à considérer
Le leasing social repose sur un équilibre fragile :
• Budgétaire : il est intégralement dépendant du financement public annuel (100 millions d’euros prévus pour 2025)
• Industriel : les volumes de véhicules produits en Europe restent limités. Certains modèles sont en tension.
• Politique : toute alternance gouvernementale ou révision des priorités budgétaires peut mettre en péril sa reconduction
Enfin, l’effet de cannibalisation sur le marché classique du leasing ne doit pas être négligé.
La LLD subventionnée peut, à court terme, déstabiliser certains équilibres tarifaires.
Le leasing social constitue à court terme un catalyseur puissant pour l’adoption de la voiture électrique par les ménages modestes.
Pour les acteurs du leasing professionnel, il révèle surtout la maturité d’un modèle combinant volume, durabilité et gestion optimisée des actifs.
L’extension de ce type de dispositif au tissu économique des TPE-PME représenterait une étape logique dans la structuration d’un écosystème français de la mobilité électrique.
Patricia Fesneau
Co-fondatrice de Leaseworld, Patricia est experte en financement des entreprises.

